Les derniers articles

Assistance administrative en matière fiscale avec la France : le secret professionnel de l’avocat couvre-t-il ses comptes bancaires ?

Dans le cadre d’une procédure d’assistance administrative en matière fiscale, la Suisse est en droit de refuser de remettre à la France de la documentation relative au compte bancaire d’un avocat, si cette dernière est couverte par le secret professionnel de l’avocat. Le compte bancaire d’un avocat ouvert au moyen d’un formulaire R – par lequel un avocat déclare à la banque qu’il ne sera pas l’ayant droit économique des avoirs car il s’agira d’avoirs qui lui seront confiés dans l’exercice de son mandat – est présumé couvert par le secret professionnel de l’avocat.

Afficher et distribuer des stickers avec des drapeaux LGBTQ formant une croix gammée est constitutif d’une incitation à la haine pénalement répréhensible

L’affichage et la distribution, dans l’espace public, d’autocollants avec des drapeaux LGBTQ disposés en croix gammée est constitutif d’incitation à la haine au sens de l’art. 261bis al. 1 CP. Le drapeau arc-en-ciel, même dans sa version renouvelée en 2018 en vue d’une plus grande inclusivité, représente, objectivement, à tout le moins les personnes homosexuelles, soit un groupe protégé par la norme pénale. Il est sans pertinence qu’il symbolise également d’autres minorités (not. trans et racisées), et que le recourant prétende avoir ciblé exclusivement la fraction la plus politisée du mouvement. Les stickers suscitent, dans l’esprit de tout tiers moyen, une association entre les personnes LGBTQ et le régime nazi, portant atteinte à la dignité de ces dernières et attisant un sentiment hostile à leur égard. Sous l’angle de la liberté d’expression, on ne peut admettre qu’il en va simplement d’une action « anti-wokiste » de contestation des revendications du mouvement LGBTQ. Même dans un contexte politique, l’assimilation du mouvement LGBTQ à un régime totalitaire ou autoritaire irait au-delà d’une confrontation d’opinions et porterait atteinte à la dignité humaine des personnes visées.

Une application de l’art. 11A al. 1 let. c LPG/GE (loi genevoise sur la mendicité) viole le principe de proportionnalité et porte ainsi atteinte aux droits fondamentaux : Le TF prononce un acquittement

Dans un arrêt destiné à publication, le TF qualifie la formulation « aux abords immédiats » de l’art. 11A al. 1 let. c LPG/GE de trop imprécise, en particulier dans le contexte de la mendicité. Notre Haute Cour rappelle en outre qu’une sanction pénale visant la mendicité passive ne peut être prononcée qu’en ultima ratio. Elle revient sur l’importance de l’accessibilité à l’information en matière de pénalisation de comportements, en particulier s’agissant de personnes allophones.

Obligation de saisir les données signalétiques en vue de l’établissement d’un profil d’ADN et d’une identification : le Tribunal fédéral laisse la question ouverte

Selon notre Haute Cour, il est possible que les systèmes d’information et d’identification gérés par Fedpol requièrent de disposer de données signalétiques – telles que des empreintes digitales ou des photographies – afin d’identifier une personne dont un échantillon d’ADN a été prélevé, voire dont le profil d’ADN a déjà été établi.

Le Tribunal fédéral élargit le champ d’application de la gestion déloyale à l’ensemble des actifs de la société anonyme surendettée

Jusqu’à présent, la diminution volontaire du patrimoine d’une société anonyme unipersonnelle surendettée relevait de l’infraction impossible de gestion déloyale. Dans le présent arrêt, le Tribunal fédéral opère un revirement de jurisprudence en retenant que le champ d’application de l’art. 158 CP comprend l’ensemble de la fortune brute d’une SA (somme des actifs), et non uniquement sa fortune nette (actifs moins fonds étrangers). Partant, tout acte de disposition de l’actionnaire unique au détriment de sa société constitue un dommage pour les créanciers de cette dernière, même si elle se trouve en état de surendettement au moment des faits.

Procédure de mise sous scellés et enregistrement sur clé USB de documents bancaires : le TF valide la pratique de l’AFC

Dans le cadre d’une procédure de mise sous scellés, l’AFC est en droit d’enregistrer les documents concernées sur une clé USB. Le Tribunal fédéral juge cette méthode conforme au droit, estimant qu’elle assure une protection suffisante des droits des personnes concernées par les documents. Par ailleurs, un contrôle sommaire visant à vérifier la complétude des données avant la mise sous scellés est admissible et ne constitue pas une violation du droit fédéral. 

Liberté d’expression et réglementation sur les armes : le TF annule la condamnation d’une journaliste

Une journaliste peut se prévaloir de l’art. 10 CEDH relatif à la liberté d’expression, de la presse et des médias, pour justifier une violation de la loi sur les armes, les accessoires d’armes et les munitions dans le cadre de l’application de l’art. 14 CP. En effet, au vu du rôle essentiel de « chien de garde » des journalistes dans une société démocratique, la liberté de presse doit être spécialement protégée.

Les proches de la victime ne peuvent pas être tenus de rembourser l’indemnité de leur conseil d’office mise à la charge de l’État 

Le Tribunal fédéral rappelle à l’ordre la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal vaudois : selon l’art. 30 al. 3 LAVI, la victime et ses proches (art. 1 al. 2 LAVI) ne sont pas tenus de rembourser les frais de l’assistance gratuite d’un défenseur. Ainsi, la Cour cantonale viole la LAVI lorsqu’elle met à la charge des quatre enfants de la défunte l’indemnité allouée à leur conseil d’office, dépens déduits.

La détention en raison d’un risque de récidive qualifié n’est en principe pas admissible dans le cas d’infractions en matière de stupéfiants

La détention en raison d’un risque de récidive qualifié n’est admissible que si l’infraction examinée était dirigée contre des biens juridiques individuels de grande valeur, tels que la vie et l’intégrité physique, psychique ou sexuelle, et s’il y a lieu de craindre sérieusement une atteinte similaire. Ces conditions ne sont en principe pas réalisées dans le cas d’infractions en matière de stupéfiants.

Le droit de se taire durant une perquisition et le seuil de la tentative de contrainte

Demander à un prévenu le code de son téléphone portable durant une perquisition sans l’avoir informé au préalable de son droit de se taire viole l’art. 158 al. 1 let. b CPP. Les preuves qui en résultent sont inexploitables au sens des art. 141 al. 1 et 158 al. 2 CPP. Par ailleurs, le seuil de la tentative de contrainte n’est pas atteint lorsque le prévenu menace des jeunes femmes dans le but d’obtenir des rendez-vous à visée sexuelle, sans que le lieu ni le moment de ces rencontres ne soient déterminés.

Levée des scellés sur un téléphone portable contenant des images intimes : l’intérêt à la poursuite pénale prime sur celui à la protection de la personnalité

La mise sous scellés d’un objet en vue de son séquestre doit reposer sur l’un des motifs prévus à l’art. 264 CPP, applicable par renvoi de l’art. 248 CPP. Les smartphones utilisés à titre privé entrent dans la catégorie des « documents personnels » au sens de l’art. 264 al. 1 let. b CPP. Ceux-ci ne bénéficient toutefois pas d’une protection absolue ; il appartient à la personne concernée de démontrer que son intérêt à la protection de sa personnalité l’emporte sur l’intérêt public à la poursuite pénale. In casu, l’intérêt du recourant à la protection d’images sexuellement explicites de lui-même et de sa compagne cède le pas devant celui à l’élucidation de l’infraction dont il est prévenu, à savoir l’importation de 7,18 kg de cocaïne coupée, en raison de la gravité des faits.