Affaire Soral : première condamnation pour incitation à la haine en raison de l’orientation sexuelle

Est constitutif d’une incitation à la haine (art. 261bis par. 1 CP) le fait de qualifier, dans une vidéo sur Internet, une journaliste de « militante queer » (dans le sens de désaxée) et de « grosse lesbienne militante pour les migrants ». Au vu des termes choisis, il ne fait pas de doute que le recourant se réfère à l’orientation sexuelle de la journaliste, soit une caractéristique protégée par l’art. 261bis CP depuis sa modification en 2020. Les termes lesbienne et queer ne sont pas utilisés dans un contexte neutre, mais dans un discours rabaissant et déshumanisant, incitant à mépriser la journaliste et l’ensemble des personnes homosexuelles en raison de leur orientation sexuelle.

I. En fait

En septembre 2021, l’essayiste franco-suisse Alain Soral réagit, dans une interview filmée et publiée sur son site internet, à un article rédigé par une journaliste avec pour titre Alain Soral diffuse aussi ses idées depuis Genève. Dans cette vidéo, accompagnée d’un portrait photo de la journaliste, l’écrivain s’exprime en ces termes : « Je crois que cet article à charge est […] signé par une militante communautaire, qui est une militante queer qui se bat aussi pour les migrants. […] Moi je suis un Suisse dans mon pays, qui défend l’âme suisse et l’esprit suisse, […], et je suis face à des gens qui à mon avis sont ultraminoritaires. Et je rappelle que queer en anglais ça veut dire, je crois, désaxé. Donc je pense qu’entre ma vision du monde et celle d’une grosse lesbienne militante pour les migrants, je pense que je suis plus, moi, un combattant pour la paix, la fraternité et l’âme suisse […] ».

Alain Soral est condamné en première instance pour diffamation (art. 173 ch. 1 CP) et libéré du chef d’accusation d’incitation à la haine (art. 261bis par. 1 CP). La juridiction cantonale admet partiellement l’appel du ministère public et condamne le prévenu pour diffamation et incitation à la haine. Au-delà des faits précédents, les juges retiennent que le casier judiciaire français de l’essayiste comporte une vingtaine de condamnations, essentiellement pour provocation à la discrimination et à la haine en raison de l’origine, l’ethnie, la nation, la race, la religion et l’orientation sexuelle, ainsi que pour des injures et diffamations reposant sur les mêmes fondements. 

Le recourant porte l’affaire devant le Tribunal fédéral en contestant sa condamnation pour incitation à la haine au sens de l’art. 261bis CP.

II. En droit

Le Tribunal fédéral commence par exposer la nouvelle teneur de l’art. 261bis CP, incriminant désormais la discrimination et le rabaissement, ainsi que l’incitation à la haine en raison de l’orientation sexuelle. Les juges rappellent que le Parlement a renoncé à ajouter l’identité de genre dans le champ d’application de l’art. 261bis CP, considérant cette caractéristique comme floue et dès lors problématique du point de vue de la prévisibilité du droit pénal (c. 1.1).

L’art. 261bis CP protège, en première ligne, la dignité humaine et l’égalité et, indirectement, la paix publique (ATF 149 IV 170, c. 1.1.1). Le premier paragraphe de la disposition incrimine l’incitation à la haine, soit le fait d’attiser des émotions chez autrui de sorte à susciter la haine et la discrimination ; une exhortation explicite n’est pas nécessaire (ATF 143 IV 193, c. 1). Le comportement doit être adopté en public, ce par quoi il faut comprendre hors du cercle privé (ATF 130 IV 111, c. 5.2.2) ; il peut consister en des paroles, écrits, images, gestes ou voies de fait. L’intention est requise, le dol éventuel étant suffisant (ATF 149 IV 170, c. 1.1.2). L’interprétation du contenu d’un discours relève de l’application du droit, revue par le Tribunal fédéral. Il convient, pour ce faire, et sous l’angle de l’art. 261bis CP, de se référer au sens qu’un destinataire non averti conférerait au discours litigieux, en tenant compte de l’ensemble des circonstances pertinentes, y compris la personne qui l’a tenu et les personnes visées. Il doit être tenu compte de la liberté d’expression (art. 16 Cst. ; art. 10 CEDH) (c. 1.2-1.5).

La juridiction cantonale a estimé qu’en rapprochant les mots queer – défini par le Petit Robert comme une personne « dont l’orientation ou l’identité sexuelle ne correspond pas aux modèles dominants » – et désaxé – décrivant, selon le même dictionnaire, une personne « qui souffre d’un déséquilibre mental » –, le recourant a fait apparaître l’orientation sexuelle de la journaliste comme déficiente, anormale et, dès lors, méprisable. Le rabaissement et la discrimination étaient d’autant plus clairs que le recourant a qualifié la journaliste de « grosse lesbienne ». Le discours litigieux faisait également apparaître l’ensemble de la communauté homosexuelle comme des personnes méprisables, indignes, déséquilibrées. Les réactions des internautes prouvent que les propos du recourant ont incité à la haine (« […] ce genre de personne est dégénérée […] » ; « […] extra-terrestre lgbt » ; « Une goudou malsaine, une de plus ») (c. 2).

Le recourant nie s’être attaqué à un groupe protégé par l’art. 261bis CP : le terme queer se référerait à l’identité de genre et non à l’orientation sexuelle. Le Tribunal fédéral se réfère aux définitions de l’orientation sexuelle et de l’identité de genre contenues dans les Principes de Jogjakarta, source de droit international souple (soft law). L’orientation sexuelle est la capacité d’une personne de ressentir une profonde attirance émotionnelle, affective et sexuelle envers des individus de sexe opposé (hétérosexuel), de même sexe (gay, lesbienne) ou de plus d’un sexe (bisexuel), et d’entretenir des relations intimes et sexuelles avec ces individus. L’identité de genre se rapporte à l’expérience intime et personnelle de son sexe profondément vécue par chaque personne, qu’elle corresponde ou non au sexe assigné à la naissance, y compris la conscience personnelle du corps et d’autres expressions du sexe, y compris l’habillement, le discours et les manières de se conduire. Le terme queer inclut tant l’orientation sexuelle que l’identité de genre. In casu, le recourant a qualifié la journaliste de « militante queer » et « grosse lesbienne militante ». Pour un auditeur moyen non averti, ces propos sont en tout état de cause dirigés à l’encontre d’une personne issue d’un groupe protégé par l’art. 261bis CP, voire à l’encontre du groupe lui-même, à savoir les personnes homosexuelles. Le terme lesbienne se rapporte en effet univoquement à l’orientation sexuelle, au-delà du fait que cette dernière est couverte par le qualificatif queer (c. 2.1.1-2.1.2).

Le recourant conteste ensuite que son discours ait exprimé une forme de mépris, dès lors que lesbienne et queer sont des termes neutres, utilisés par la communauté LGBTI, et que queer signifie originellement désaxé. Le Tribunal fédéral note, au contraire, que le recourant n’a pas mobilisé ces mots dans un contexte neutre ; l’ensemble de son langage est rabaissant, déshumanisant et outrancier, invitant les internautes à mépriser la personne visée en raison de son orientation sexuelle. L’homophobie de son discours est d’autant plus claire que celui-ci est construit sur une opposition entre la journaliste/la communauté homosexuelle et les valeurs qu’il défend, prétendument la paix, la fraternité et l’âme suisse. Le discours du recourant tend, de toute certitude, à attiser la haine en raison de l’orientation sexuelle, étant rappelé qu’il suffit d’exciter, même de manière non explicite, des personnes déjà animées par des sentiments homophobes. Enfin, contrairement à ce que prétend le recourant, la juridiction cantonale était en droit de prendre en considération les commentaires publiés par des internautes en réaction à la vidéo. Si le recourant ne répond certes pas de telles déclarations, celles-ci peuvent néanmoins servir à établir la signification du discours litigieux pour un tiers moyen non averti. Ici, les commentaires prouvent que les destinataires moyens avaient interprété le message comme haineux et discriminatoire et que, de surcroît, celui-ci les avait incités à exprimer leur haine homophobe (c. 2.2.1-2.2.4).

Sous l’angle subjectif, la juridiction cantonale a souligné que le recourant avait, consciemment et volontairement, attisé à la haine et la discrimination envers la journaliste et la communauté lesbienne, notamment en choisissant ses mots et en se mettant en scène. À ceci s’ajoute qu’il avait déjà fréquemment été condamné pour avoir injurié et diffamé des personnes en raison de leur orientation sexuelle. Ses antécédents témoignent de son homophobie. Ainsi, ces précédentes condamnations sont utiles pour évaluer la personnalité du recourant, qui a pour objectif de diffuser ses opinions. En conclusion, on ne saurait estimer que la juridiction précédente a fait preuve d’arbitraire en retenant l’intention du recourant. L’ensemble des éléments constitutifs de l’art. 261bis CP sont remplis (c. 3).

Le recourant se plaint en outre d’une violation de la liberté d’expression (art. 16 al. 1 Cst., art. 10 al. 1 CEDH), en faisant valoir la protection conférée aux journalistes dans le débat politisé. La liberté d’expression peut être restreinte aux conditions de l’art. 36 Cst.. À l’échelon régional, la CourEDH considère que les propos relatifs à des questions d’intérêt public doivent être fortement protégés, alors que les discours justifiant la haine ou toute forme d’intolérance, en contradiction avec les valeurs sous-tendant la CEDH, sont soustraits à la protection de l’art. 10 CEDH par l’art. 17 CEDH (interdiction de l’abus de droit). En l’espèce, la vidéo ne s’inscrit guère dans un contexte politisé. L’argument du recourant, selon lequel « la question LGBTI » serait politique, car elle « interpelle nos sociétés occidentales notamment les propagandes visant les enfants » ne peut être admis, dès lors que son discours ne traite pas de cela, mais vise simplement à rabaisser, gratuitement, des personnes en raison de leur orientation sexuelle. La protection de l’art. 10 CEDH est donc, à tout le moins, réduite, si ce n’est exclue (c. 4).

Le recours est rejeté sur tous les points ci-dessus, dans la mesure où il est recevable (c. 9).

III. Commentaire

L’arrêt résumé ci-dessus constitue la première occasion pour le Tribunal fédéral de se prononcer sur l’application de l’art. 261bis CP à un discours de haine homophobe. La rigueur juridique des juges doit ici être saluée, en particulier car elle s’accompagne d’une analyse contextuelle du discours, dont la composante discriminatoire est attestée par une pluralité d’éléments. Il est à noter que, si le Tribunal fédéral parvient à démontrer la typicité de l’art. 261bis par. 1 CP incriminant l’incitation à la haine, le comportement du recourant aurait aussi rempli les éléments constitutifs de l’art. 261bis par. 4 CP sanctionnant le rabaissement.

Trois grands enseignements peuvent être tirés du développement des juges. Premièrement, le Tribunal fédéral rappelle qu’il convient de se référer au sens que conférerait un « tiers moyen non averti » au discours litigieux pour déterminer son caractère discriminatoire. En d’autres termes, il s’agit de se demander si le message apparaît, aux yeux d’une « personne moyenne », comme fondé sur une hostilité en raison d’une caractéristique protégée, ici l’orientation sexuelle. À défaut, l’art. 261bis par. 1 CP ne trouve pas application, étant rappelé qu’il en va de même pour l’art. 261bis par. 4 CP. Dans le présent arrêt, les juges précisent qu’il s’impose de tenir « compte de l’ensemble des circonstances pertinentes, y compris la personne qui [a tenu le discours] et les personnes visées ». Il n’est pas clair de savoir s’il faut entendre par personnes visées les personnes ciblées par le discours haineux – ici la journaliste et, plus largement, les personnes homosexuelles – ou les auditeurs du discours. Bien que la lecture de cette phrase du Tribunal fédéral laisse a priori penser qu’il conviendrait de prendre en considération la perception d’une personne concernée, la suite du développement tend plutôt à l’infirmer, n’apportant donc pas de rupture dans la jurisprudence relative à l’art. 261bis CP. En effet, le sens qu’une personne homosexuelle attribuerait aux propos litigieux n’est nullement recherché. Au contraire, c’est bien la perception des internautes – les tiers moyens non avertis – qui est pertinente.

À cet égard, quand bien même il faut admettre que le tiers moyen non averti est une fiction juridique, il est intéressant de relever que le Tribunal fédéral ne raisonne pas dans l’abstraction pour évaluer le sens conféré au discours d’Alain Soral. En effet, les juges se fondent concrètement sur les commentaires publiés en réaction à la vidéo de l’essayiste pour démontrer que son discours a été interprété comme haineux et discriminatoire. Plus encore, lesdits commentaires permettent au Tribunal de montrer que le discours du recourant a généré des attitudes haineuses à l’encontre de la victime en raison de son orientation sexuelle. Sachant qu’il suffit d’attiser, même de manière non explicite, l’hostilité de personnes homophobes, le raisonnement des juges est convaincant. Le contenu du message doit également être interprété en tenant compte de son auteur. Le Tribunal fédéral se montre particulièrement clair à cet égard, en recherchant le caractère potentiellement homophobe du recourant et, en cela, en tentant de cerner sa personnalité. Rappelons que la CourEDH estime, dans le même sens, qu’une attention particulière doit être portée à la personnalité de l’auteur dans l’appréciation du discours litigieux (not. CourEDH Rouillan c. France du 23 juin 2022, § 66).

Deuxièmement, il apparaît tout à fait opportun que les juges tiennent compte, sous l’angle subjectif, des précédentes condamnations du recourant, en tant qu’elles attestent de ses préjugés. La démarche n’est du reste pas inédite, mais se retrouve notamment dans la récente condamnation de Dieudonné pour négation d’un génocide au sens de l’art. 261bis par. 4, 2ème partie CP (ATF 149 IV 170, in : crimen.ch/183/). Précisons que les antécédents de l’auteur ne sont, à ce stade, pas utilisés pour fonder sa culpabilité, mais en tant qu’indice pour établir ses biais homophobes ; ils ne s’avéreront utiles à déterminer la culpabilité de l’auteur qu’au stade de la fixation de la peine (c. 8, non résumé ci-dessus).

Enfin, troisièmement, l’arrêt du Tribunal fédéral appelle à des remarques relatives à l’absence de l’identité de genre parmi les caractéristiques protégées par l’art. 261bis CP. Comme les juges prennent soin de le rappeler, le Parlement a renoncé à inclure l’identité de genre dans la norme pénale antidiscriminatoire, au prétexte de l’imprécision de cette notion et de l’exigence de prévisibilité de la loi pénale (à ce propos, cf. Camille Montavon, La transidentité dans les politiques pénales suisses : de l’impensé à l’effacement ?, in : Daniel Fink/André Kuhn/Joëlle Vuille (éds.), La criminologie en Suisse : Histoire, état, avenir, Bâle 2024, 1 ss). La crainte était ainsi que les juges ne soient pas en mesure d’établir si le discours ou l’acte discriminatoire avait été adopté en raison de l’identité de genre. Le présent arrêt a ceci d’intéressant qu’il apporte la preuve inverse : alors même qu’ils n’étaient pas tenus de le faire – le discours litigieux visant en tout état de cause une caractéristique couverte par l’art. 261bis CP (l’orientation sexuelle) –, les juges s’attachent à définir l’identité de genre. À cette fin, ils mobilisent les définitions proposées dans les Principes de Jogjakarta, source de soft law transposant les droits humains aux personnes LGBT+. Il s’agit de la première référence d’une autorité judiciaire suisse à ces principes, qui avaient d’ailleurs été cités dans le projet de la CAJ-N lors des discussions parlementaires sur la révision de l’art. 261bis CP en 2018. Sur la base de la définition fournie par les Principes de Jogjakarta, les juges fédéraux parviennent à démontrer que le recourant ne visait non pas l’identité de genre de la journaliste, mais son orientation sexuelle, et ce quand bien même il avait utilisé le terme queer, qui inclut certes l’identité de genre. Il est notable que, contrairement à ce que prétendaient les opposants à une révision de l’art. 261bis CP intégrant l’identité de genre, les juges cernent donc sans peine les contours de cette notion, et même ceux de termes plus larges tels que queer.

Ce qui précède invite à repenser, au-delà de cette affaire, l’inclusion de l’identité de genre dans la liste de caractéristiques protégées par l’art. 261bis CP, à l’heure où les sondages de victimisation en matière de discours et criminalité de haine en Suisse – peu nombreux mais concordants – témoignent d’une importante exposition des personnes trans à la violence identitaire (LGBTIQ Helpline, Rapport sur les crimes de haine 2023, Berne 2023 ; Swiss LGBTIQ+ Panel, Rapport de synthèse, Université de Zurich 2023 ; Nora Markwalder/Lorenz Biberstein/Dirk Baier, Hate-Crime-Opfererfahrungen in der Schweiz : Ergebnisse des Crime Survey, Université de Saint-Gall 2022). Ces constats sont d’ailleurs dans la lignée des recherches étrangères indiquant que les personnes trans sont surreprésentées parmi l’ensemble des groupes exposés à ce type de criminalité (not. Tasseli McKay/Christine Lindquist/Shilpi Misra, Understanding (and Acting On) 20 Years of Research on Violence and LGBTQ+ Communities, Trauma, Violence, & Abuse 2019, 665 ss ; Mark Walters et al., Hate Crimes Against Trans People: Assessing Emotions, Behaviors, and Attitudes Toward Criminal Justice Agencies, Journal of Interpersonal Violence 2020, 4583 ss ; Jane Gauthier/Kevin Medina/Carly Dierkhising, Analysis of Hate Crimes in Transgender Communities, Journal of Hate Studies, 2021, 4 ss).

Si l’incitation à la haine transphobe n’est pas punissable en droit suisse aujourd’hui, il est vrai que des infractions fondées sur une motivation discriminatoire en raison de l’identité de genre ne tombent pas dans un vide juridique du seul fait qu’elles ne sont pas constitutives de l’art. 261bis CP. Elles peuvent être poursuivies et sanctionnées en tant qu’infractions « ordinaires », le motif transphobe devant être considéré au stade de la fixation de la peine, sous l’angle de l’art. 47 al. 2 CP. Dans cette hypothèse, l’auteur ne serait donc pas sanctionné pour discrimination, mais pour une autre infraction (p. ex. contre l’honneur ou contre l’intégrité corporelle cas de comportement discriminatoire de nature physique), avec une peine adaptée en fonction de sa motivation. Or, cette situation est insatisfaisante, en ce qu’elle ne permet pas de refléter, dans la loi, le caractère unique du crime de haine, qui n’est pas uniquement une infraction aggravée par la présence d’un sentiment haineux, mais une forme spécifique de criminalité (qui emporte des conséquences particulières sur les victimes et leur communauté), nécessitant dès lors d’être réprimée dans une disposition pénale spécifique elle aussi (à ce propos et pour approfondir, cf. principalement Mark Walters, Criminalising Hate: Law as Social Justice Liberalism, Cham 2022, 85 ss ; et, pour des propositions de réformes du droit pénal suisse, cf. Camille Montavon, À propos des crimes de haine anti-LGBT : théorisation, législation, et perspectives en droit pénal suisse, NCrim 2023, 12 ss). Il en va du respect du principe de fair labelling et, en cela, d’une question de transparence du droit pénal : si une infraction est fondée sur une hostilité à l’égard d’une personne en raison de son appartenance à un groupe social déterminé, elle doit être qualifiée comme telle juridiquement, à savoir, dans notre Code pénal, en tant que discrimination au sens de l’art. 261bis CP.

En tout état de cause, et pour conclure, cet arrêt du Tribunal fédéral constitue un important précédent, offrant des lignes directrices pour de futurs cas d’incitation à la haine en raison de l’orientation sexuelle, voire de l’identité de genre, si la norme pénale anti-discriminatoire venait à être révisée en ce sens dans les prochaines années.

Proposition de citation : Camille Montavon, Affaire Soral : première condamnation pour incitation à la haine en raison de l’orientation sexuelle, in : https://www.crimen.ch/266/ du 2 mai 2024