Chronique de jurisprudence annuelle 2024
crimen.ch publie sa chronique de jurisprudence annuelle en matière pénale de l’année 2024.
crimen.ch publie sa chronique de jurisprudence annuelle en matière pénale de l’année 2024.
Le Tribunal fédéral rejette une demande d’assistance administrative en matière fiscale présentée par la Russie qui portait sur des renseignements au sujet de comptes bancaires détenus en Suisse. Il renonce ainsi à une nouvelle suspension de la procédure, notamment en raison de la possibilité pour la Russie de déposer ultérieurement une nouvelle requête d’assistance.
La personne concernée n’a pas de droit à accéder à l’intégralité du dossier d’une procédure d’entraide clôturée, pas même en application des règles de protection des données personnelles, même si les pièces issues de ladite procédure ont été transmises à une autorité (fiscale) suisse.
L’art. 2 EIMP, qui permet de déclarer irrecevable une demande d’entraide, ne peut pas être invoqué dans un cas de séquestre de valeurs patrimoniales. En outre, le séquestre de valeurs patrimoniales d’une durée de huit ans ne viole ni le principe de proportionnalité, ni la garantie de la propriété, et ce, malgré la suspension de l’entraide judiciaire pénale avec la Russie.
Dans le cadre d’une demande d’entraide du Brésil à la Suisse portant sur la remise de documentation bancaire et de fonds à hauteur de USD 16 millions (art. 74a EIMP), le Tribunal fédéral laisse ouverte la question de la possibilité pour une personne morale d’invoquer la clause de l’ordre public de l’art. 2 EIMP. Par ailleurs, le jugement brésilien sur lequel repose la demande de confiscation est clair, définitif et exécutoire. Toute question matérielle y relative n’est donc pas recevable devant les autorités suisses. Enfin, la durée du séquestre de 22 ans n’a pas été considérée comme excessive par le Tribunal fédéral au vu de l’ampleur de la procédure.
La personne qui a fait l’objet d’une procédure d’extradition vers la Russie qui s’est soldée par un échec en raison de l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022 a le droit à une indemnité sur la base de l’art. 15 EIMP. En effet, la demande d’extradition a été rejetée avant le terme de la procédure extraditionnelle et sa détention, bien que licite au cours de la procédure, se révèle à présent injustifiée. En outre, les frais de détention générés par la procédure d’extradition ne peuvent lui être imputés et l’entier du montant de sa caution doit lui être restitué.
Dans le cadre d’une demande d’entraide judiciaire de l’Angola à la Suisse portant notamment sur la remise de documentation bancaire, l’entraide ne peut pas être accordée faute de procédure pénale encore pendante dans l’État requérant. En outre, les garanties diplomatiques que le Tribunal fédéral avait reconnues dans un arrêt précédent comme nécessaires et essentielles à l’octroi de l’entraide, ne seront manifestement pas prises en compte par l’État requérant puisque ce dernier a déjà rendu un jugement définitif.
Lorsque les autorités pénales suisses ont établi leur compétence à poursuivre une infraction et demandent à l’OFJ de procéder à une diffusion internationale d’une recherche en vue d’arrestation et d’extradition, l’Office ne peut pas leur opposer des considérations relevant de l’opportunité pour refuser leur demande. Son analyse de la demande doit se limiter à la cohérence entre l’exposé des faits et sa qualification juridique et au respect de la législation régissant la matière. Les conditions de l’art. 264m CP ne permettent pas de retenir que la présentation d’une demande d’extradition est exclue.
Une éventuelle utilisation prématurée des renseignements transmis dans le cadre d’une équipe commune d’enquête par l’État requérant n’emporte pas de conséquences lorsque l’entraide est accordée dans une décision de clôture ultérieure. De plus, concernant le principe de la spécialité, il convient de faire une distinction entre la simple prise de connaissance des renseignements par les autorités fiscales de l’État requérant et une « utilisation prohibée » de leur part. Seule la deuxième hypothèse est constitutive d’une violation du principe.
Dans le cadre d’une affaire portant sur une demande d’entraide judiciaire de la Belgique concernant notamment l’exécution d’une décision belge qui prononce une créance compensatrice (art. 71 CP), le Tribunal pénal fédéral avait admis l’application de l’art. 74a EIMP (remise à un État étranger en vue de confiscation ou de restitution). Le Tribunal fédéral va à l’encontre de cette décision et confirme après analyse que l’absence des termes « créances compensatrices » à l’art. 74a EIMP signifie que ces dernières ne sont pas visées par cette disposition et que donc seuls les art. 94 ss EIMP (exécution des décisions étrangères) sont applicables.
La saisie à titre provisionnel d’avoirs bancaires ordonnée dans le cadre d’une demande d’entraide judiciaire russe doit être maintenue et ce même si la demande d’entraide judiciaire est provisoirement suspendue en raison du non-respect par la Russie de ses engagements internationaux.
En matière d’extradition, les principes de la CourEDH sur les peines de réclusion à vie sans possibilité de libération conditionnelle prononcées dans des États parties à la CEDH s’appliquent de manière modulée, entraînant un examen en deux étapes. Premièrement, le requérant doit démontrer qu’il existe des raisons sérieuses de penser qu’il sera, dans l’État requérant, condamné à une telle peine. Deuxièmement, il s’agit de vérifier s’il existe dans l’État requérant un mécanisme de réexamen de la peine axé sur l’amendement du détenu. Dans le présent arrêt, la CourEDH revient ainsi sur sa jurisprudence Trabelsi c. Belgique.