Les limites du droit de réitérer une perquisition sur des documents et objets déjà restitués à l’ayant droit

La décision refusant la levée des scellés n’acquiert pas la même autorité de la chose jugée qu’une décision finale. En ce sens, il est possible pour une autorité pénale de réitérer un ordre de dépôt ou une perquisition sur des documents ou objets qui ont déjà été restitués à leur ayant droit à la suite d’une première procédure de scellés. Cela étant, cette possibilité ne saurait permettre à l’autorité pénale d’éviter les conséquences du non-respect du délai légal imposé par l’art. 248 al. 2 CPP. En outre, la situation factuelle, juridique ou l’appréciation de celles-ci doit avoir suffisamment évolué et être clairement démontrée pour qu’une telle répétition soit autorisée.

La notification par voie électronique des communications adressées par un tribunal à une partie à la procédure : faculté du premier ou droit de la seconde ?

L’art. 86 al. 1 CPP constitue une Kann-Vorschrift, formulée dans le sens d’une faculté des autorités pénales de recourir à la notification de leurs communications par voie électronique, et non une obligation d’accéder aux demandes des justiciables exprimées dans ce sens. Si la lettre des art. 9 al. 3 et 12 al. 1 OCEI-PCPP n’exclut pas une interprétation en faveur d’un droit des parties à la notification par voie électronique des actes d’une juridiction, ces dispositions ont toutefois pour seul but de concrétiser la loi et l’on ne saurait dès lors excéder le cadre légal tracé par le texte de rang supérieur pour en déduire un droit qu’il ne prévoit pas. Cette situation sera toutefois modifiée avec la concrétisation du Projet Justitia 4.0 sur la numérisation de la justice.

Nouvel art. 364b al. 2 CPP : séparation des fonctions entre le juge de la détention et le juge du fond

Seule la direction de la procédure de la juridiction d’appel est compétente pour prolonger la détention pour des motifs de sûreté dans le cadre d’un recours contre une décision ultérieure. Le texte de l’art. 364b al. 2 CPP est clair. Comme les mesures prononcées par un jugement de première instance et celles prononcées dans le cadre de décisions ultérieures n’ouvrent pas les mêmes voies de droit (les premières pouvant faire l’objet d’un appel, les secondes n’étant susceptibles que du recours), la séparation des fonctions ne prévaut qu’en matière de décisions ultérieures. Cette dichotomie est critiquée par la doctrine. L’introduction d’un alinéa 3 à l’art. 365 CPP prévu par la révision actuelle du CPP pourrait y pallier en dépit de la jurisprudence fédérale.

Sonorisation en prison : les visites au parloir peuvent être enregistrées à l’aide de moyens techniques de surveillance (art. 280 ss CPP) lorsqu’ils ne visent pas le détenu

Lorsque des personnes ayant le statut de prévenues viennent rendre visite à des détenus également prévenus mais dans une procédure pénale distincte, le ministère public peut mettre en place une mesure technique de surveillance au parloir de la prison sans violer l’art. 281 al. 3 let. a CPP. Tant que les prévenus dans la procédure au sein de laquelle la mesure technique de surveillance est ordonnée ne sont pas en détention, rien n’empêche la mise en place d’une telle mesure technique de surveillance.

Procédures pénale et d’entraide internationale parallèles : recours en matière pénale ou de droit public contre l’accès au dossier ?

Lorsque sont conduites en parallèle en Suisse, dans un même complexe de faits, une procédure d’entraide internationale et une procédure pénale, accorder un accès illimité au dossier de la seconde peut avoir pour conséquence de contourner les règles de la première. Le risque est particulièrement important lorsque l’État étranger requérant l’entraide est partie plaignante ou qu’il contrôle l’entité qui a cette qualité. Se pose alors la question de savoir quel recours est ouvert au Tribunal fédéral contre la décision portant sur l’accès au dossier de la procédure pénale par la partie plaignante.

Le prélèvement des empreintes digitales et d’un échantillon ADN ainsi que l’établissement du profil ADN suite à une manifestation pacifique dans le but de prévenir d’éventuelles infractions futures sont disproportionnés

Le prélèvement des empreintes digitales et d’un échantillon d’ADN ainsi que l’établissement d’un profil ADN sont autorisés pour l’élucidation d’infractions futures s’il existe des indices sérieux et concrets que le prévenu est impliqué dans d’autres infractions d’une certaine gravité. Les conditions de l’art. 36 Cst. reprises à l’art. 197 al. 1 CPP doivent être respectées. Tel n’est pas le cas lorsque lesdites mesures de contrainte sont mises en œuvre à l’encontre d’un prévenu qui a participé à une manifestation pacifique durant laquelle aucun acte de violence n’a été commis.

Les participants visés par une plainte pénale pour violation de domicile

Quand une infraction continue est consommée, mais pas encore achevée, la plainte pénale couvre également les faits se déroulant après son dépôt. La plainte vise ainsi tous les participants à l’infraction, notamment ceux qui interviennent après qu’elle soit déposée, à condition que le comportement auquel ils prennent part leur soit imputable conformément aux règles matérielles de la participation. En ce sens, la plainte pénale vaut également contre les coauteurs assumant un rôle décisif et les complices prêtant assistance lors de l’exécution de l’infraction continue dans une même propriété. En revanche, les auteurs directs juxtaposés (Nebentäter) commettant l’infraction avec une intention indépendante, ne peuvent se voir imputer le comportement des inconnus visés par la plainte pénale.

La qualité pour recourir au Tribunal fédéral des autorités administratives cantonales chargées de la poursuite des contraventions

Les autorités administratives cantonales compétentes en matière de contraventions (art. 17 CPP) disposent des attributions du ministère public (art. 357 al. 1 CPP). Elles n’ont cependant pas qualité pour recourir en matière pénale au Tribunal fédéral. En effet, elles n’ont pas un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée découlant de l’exercice de l’action publique et ne peuvent donc pas être assimilées à l’accusateur public au sens de l’art. 81 al. 1 let. b ch. 3 LTF.

Le complétement factuel de l’acte d’accusation devant la juridiction d’appel

Lorsque la cause est entre les mains de la juridiction d’appel, l’interdiction de la reformatio in peius lui défend d’inviter le ministère public à procéder à un complétement factuel de l’acte d’accusation et, par là même, de rendre une déclaration de culpabilité étendue par rapport à celle du jugement attaqué du tribunal de première instance. Si l’autorité de poursuite procède toutefois en ce sens, l’art. 333 al. 2 CPP n’est pas applicable devant la juridiction d’appel, sauf à méconnaître le droit à un double degré de juridiction garanti par la LTF (art. 80 al. 2), le droit constitutionnel (art. 32 al. 3 Cst.) et le droit international des droits de l’homme (art. 2 par. 1 Protocole n° 7 CEDH).

L’échéance d’un titre de détention au cours d’une détention pour des motifs de sûreté et les conséquences de sa prolongation tardive

Une ordonnance provisoire de prolongation de la détention ne constitue pas un titre juridiquement valable justifiant une détention pour des motifs de sûreté. L’absence temporaire d’un titre de détention dans le cadre d’une procédure d’appel n’entraîne pas automatiquement une libération immédiate. Une violation des règles de procédure relatives à la détention avant jugement peut être réparée d’emblée par une constatation de l’irrégularité, une admission partielle du recours sur ce point, la mise à la charge de l’État des frais de justice et l’octroi de pleins dépens au recourant.

Le tribunal des mesures de contrainte ne peut pas ordonner la détention provisoire pour une durée supérieure à celle requise par le ministère public

Le tribunal des mesures de contrainte outrepasse ses compétences s’il ordonne la mise en détention du prévenu pour une durée plus longue que celle requise par le ministère public dans ses conclusions. De la même manière, la répartition des rôles entre le ministère public et le tribunal des mesures de contrainte n’est pas respectée si celui-ci prononce la détention provisoire alors que le ministère public n’a requis que des mesures de substitution. Il est en revanche admissible que le tribunal des mesures de contrainte prononce des mesures de substitution plus incisives que celles requises par le ministère public.