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Inexploitabilité absolue des aveux obtenus : les agents infiltrés ne peuvent pas faire usage de pressions dans le but de contourner le droit du prévenu de garder le silence

Une investigation secrète ne peut avoir pour résultat l’obtention d’aveux sous la pression des agents infiltrés, conduisant à un contournement du droit du prévenu de ne pas s’auto-incriminer. En particulier, le fait d’exploiter les croyances et la superstition d’un prévenu en instiguant dans son esprit l’existence d’une grave menace de l’esprit malveillant de sa femme assassinée afin de lui faire avouer sa mise à mort contrevient à l’art. 140 al. 1 CPP. Les aveux ainsi obtenus doivent être déclarés absolument inexploitables (art. 141 al. 1 CPP).

Refus de report des débats en appel

L’intervention d’un second avocat en appel, aux côtés de l’avocat mandaté pour la procédure de première instance, ne constitue pas un motif suffisant de report des débats en l’absence de questions nouvelles nécessitant des connaissances spéciales. Si le second avocat n’est pas en mesure d’assurer la défense du prévenu compte tenu des échéances fixées de longue date, il ne doit pas accepter le mandat.

Décision admettant la compétence territoriale des autorités suisses : recours du prévenu au Tribunal fédéral irrecevable

La décision par laquelle l’autorité d’instruction admet sa compétence territoriale en application des art. 3 ss CP peut être réexaminée par le juge du fond. Elle ne règle donc pas définitivement la question de la compétence et n’est pas susceptible de recours immédiat au sens de l’art. 92 LTF. En outre, elle ne cause généralement pas de préjudice irréparable au prévenu au sens de l’art. 93 al. 1 let. a LTF.

Le droit à une défense « concrète et effective »

L’assistance judiciaire doit permettre au prévenu de bénéficier d’une défense compétente, assidue et efficace. Une demande de changement de défenseur d’office doit être accordée lorsque, pour des raisons objectives, une représentation adéquate des intérêts du prévenu par le mandataire en place n’est plus garantie. Tel n’est pas le cas lors de simples défaillances dans la conduite du procès ou dans l’argumentation.

Le Tribunal fédéral tranche une controverse : la dissolution judiciaire d’une société (art. 731b al. 1bis ch. 3 CO) ne réalise pas la condition objective de punissabilité requise lors d’une infraction dans la faillite (art. 163 ss CP)

En tant qu’il prévoit de mettre fin à l’existence d’une société dont seules les carences organisationnelles ont provoqué sa dissolution et sa liquidation subséquente, l’art. 731b al. 1bis ch. 3 CO ne constitue pas un motif matériel d’ouverture de faillite. En effet, la disposition vise essentiellement à régler une situation non conforme au droit des sociétés. Son application se désintéresse ainsi des questions d’endettement et de solvabilité. Ce faisant, la disposition ne vaut pas un prononcé de faillite rendu par un juge des faillites et ne réalise pas la condition objective de punissabilité requise pour appliquer les art. 163 ss CP.

Primauté d’application de la LAsi sur les dispositions pénales de la LEI en cas de décision de renvoi exécutoire : sanctions et principe de la légalité

L’art. 2 al. 1 LEI prévoit l’application de cette loi aux personnes étrangères dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral, en particulier celles de la LAsi. Lorsqu’une personne requérante d’asile fait l’objet d’une décision de renvoi exécutoire, l’obligation de collaborer à l’obtention de documents de voyage au sens de l’art. 8 al. 4 LAsi prime celle des art. 120 al. 1 let. e cum art. 90 let. c LEI. La LAsi ne prévoyant pas – contrairement à la LEI – de sanction pour la violation d’une telle obligation, une peine prononcée sur la base des art. 120 al. 1 let. e cum art. 90 let. c LEI – inapplicables dans une telle configuration – viole le principe de la légalité.

Suicide en détention provisoire : poursuite pénale des policiers pour homicide par négligence

L’indemnisation accordée à la mère du défunt par la CourEDH ne permet de compenser ni la violation constatée ni le refus d’ouvrir une procédure pénale prononcé en violation de la CEDH. Seule l’ouverture d’une enquête effective sur les circonstances du décès permet la mise en œuvre du droit à la vie. L’exigence du degré de probabilité d’une condamnation est moins élevée pour l’autorisation de poursuite pénale que pour la mise en accusation. Cela vaut d’autant plus pour des infractions graves, en particulier si le jugement pénal porte sur la mort d’une personne.

Juge dans la procédure simplifiée qui échoue, puis dans la procédure ordinaire : pas un motif de récusation en principe

Le fait pour un juge de la procédure ordinaire d’avoir siégé dans le tribunal ayant rejeté une procédure simplifiée ne constitue en principe pas un motif de récusation au sens de l’art. 56 let. f CPP. Il n’y a donc pas lieu de redouter une activité partiale lorsque la procédure simplifiée n’a pas abouti en raison du fait que le prévenu n’a pas confirmé ses aveux lors des débats. Il en va autrement lorsque la procédure simplifiée échoue parce que le tribunal considère que la sanction proposée par le ministère public est trop clémente et plus généralement lorsqu’un juge s’exprime dans la procédure simplifiée d’une manière ne laissant aucun doute quant au fait qu’il a déjà forgé sa conviction en tenant la culpabilité du prévenu pour établie.

Remise en vue de confiscation à un État étranger : respect du droit d’être entendu de la personne visée par la confiscation non prévenue dans la procédure pénale étrangère

Lorsque l’État requérant demande la remise en vue de confiscation (art. 74a EIMP) des avoirs déposés sur un compte sis en Suisse et que la personne touchée par la mesure n’a pas la qualité de prévenu dans la procédure étrangère ayant mené au jugement définitif et exécutoire présenté à cet effet, l’autorité d’exécution doit s’assurer que son droit d’être entendu a été respecté dans la procédure étrangère. À défaut, les droits découlant de l’art. 6 CEDH sont violés dans l’État requérant et l’entraide doit être refusée en vertu de l’art. 2 let. a et d EIMP.

Assistance au suicide : un médecin ayant prescrit du pentobarbital à une patiente en bonne santé et ne souffrant d’aucune maladie ne peut être condamné pour violation de la LPTh

En matière de prescription de substances soumises à contrôle au sens de la législation sur les stupéfiants, la LStup – à tout le moins ses dispositions pénales – constitue une lex specialis par rapport à la LPTh. Dès lors, la prescription d’une substance létale à une personne en bonne santé, capable de discernement et désireuse de mourir ne tombe pas sous le coup des art. 26 al. 1 cum art. 86 al. 1 let. a aLPTH, ledit comportement n’étant pas appréhendé par la LTPh.

Demande de récusation déposée un jour après le dispositif jugée recevable

Une demande de récusation peut être déposée le lendemain de la lecture du dispositif sans contrevenir au principe de la bonne foi lorsqu’elle concerne une apparence de prévention du magistrat durant les débats. Le fait que ce dernier ait le même jour notifié oralement le dispositif du jugement très peu de temps après la clôture des débats est un élément pouvant démontrer le préjugement. Le dépôt de la demande de récusation peut ainsi intervenir après la clôture des débats plutôt que d’être déposée directement aux débats.

Procédure de scellés, copie-miroir des données et inexploitabilité des preuves

Une fois la mise sous scellés (art. 248 CPP) demandée, l’autorité de poursuite ne peut plus procéder – elle-même ou par l’intermédiaire d’un tiers – à la copie-miroir (copie forensique) d’un support de données informatiques. Elle doit la demander au juge des scellés, qui est seul compétent pour l’ordonner. En l’espèce, les vices affectant la procédure de scellés sont si graves qu’ils entraînent le rejet de la requête de levée de scellés, la destruction de la copie-miroir et l’inexploitabilité des preuves récoltées.