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Pas de thérapie par électrochocs sous la contrainte

Un jugement pénal qui prononce une mesure thérapeutique institutionnelle (art. 59 CP) contre l’auteur tout en réservant la possibilité d’une médication forcée ne permet pas à l’autorité d’exécution des peines d’ordonner une thérapie par électrochocs (électroconvulsivothérapie) sous la contrainte, traitement distinct et, en l’état actuel de la science, sujet à débat.

Écoutes téléphoniques : une durée de 17 mois pour requérir l’autorisation d’une découverte fortuite est largement excessive, même si le délai de 24 heures est une prescription d’ordre 

En cas de découverte fortuite issue d’une surveillance active d’un raccordement téléphonique (art. 269 ss CPP), l’autorité de poursuite pénale doit immédiatement ordonner la surveillance et requérir l’autorisation du tribunal des mesures de contrainte (TMC) pour l’exploiter contre un nouveau prévenu (art. 278 CPP). Un délai de 17 mois entre l’identification de la découverte fortuite et la requête au TMC est excessif, de sorte que le TMC doit refuser la requête en pareil cas. En conséquence, l’ensemble des opérations d’instruction effectuées sur cette base sont absolument inexploitables et doivent être écartées du dossier pénal, puis détruites à l’issue de la procédure.

Refus d’ordonner une nouvelle expertise psychiatrique et préjudice juridique au sens de l’art. 394 let. b CPP

La personne qui souhaite recourir contre le refus du ministère public d’ordonner un acte d’instruction doit établir l’existence d’un préjudice juridique au sens de l’art. 394 let. b CPP. Un pareil préjudice est admis lorsque le refus d’instruire concerne des moyens de preuve qui risquent de disparaître. Si le refus d’instruire porte sur la mise en œuvre d’une nouvelle expertise psychiatrique, le risque que le moyen de preuve disparaisse réside dans le fait que la procédure de première instance a lieu, en règle générale, plusieurs mois voire plusieurs années après l’établissement de l’expertise. Si le tribunal du fond devait arriver à la conclusion que l’expertise psychiatrique présente des lacunes ou est inexploitable, la mise en œuvre d’une nouvelle expertise, après l’écoulement d’un temps conséquent, ne serait potentiellement plus pertinente. Il revient en principe au recourant de démontrer que ce risque pourrait se réaliser.

Participation à l’infraction, perpétration par métier et affiliation à une bande

La commission en bande constitue une forme de commission en commun plus intense que la coactivité, car elle se caractérise par un but commun et supérieur ainsi qu’une volonté de former un groupe consolidé. L’affiliation à une bande suppose que le membre participe à la cohésion de celle-ci et à la réalisation de son objectif. Pour que cette circonstance personnelle soit réalisée, il faut notamment fournir une contribution déterminante lors de la décision, la planification ou l’exécution des infractions. En outre, l’absence de revenus légaux d’un auteur ou d’un participant ne permet pas de retenir la circonstance aggravante du métier. De manière générale, inscrire les contributions d’un auteur ou d’un participant dans un contexte global diffus, sans énumérer précisément les éléments pertinents ne suffit pas à retenir la commission en bande et la perpétration par métier.

Entraide judiciaire pénale avec la Russie : suspension provisoire de la procédure d’entraide mais maintien de la saisie d’avoirs bancaires situés en Suisse

La saisie à titre provisionnel d’avoirs bancaires ordonnée dans le cadre d’une demande d’entraide judiciaire russe doit être maintenue et ce même si la demande d’entraide judiciaire est provisoirement suspendue en raison du non-respect par la Russie de ses engagements internationaux.

Le ministère public ne peut plus recourir contre les décisions rendues par le TMC en matière de détention

Le Tribunal fédéral met fin à sa jurisprudence constante en matière de détention et s’aligne sur la volonté du législateur : seule la personne détenue peut désormais s’opposer aux décisions rendues par le TMC selon l’art. 222 CPP. Ainsi, le ministère public ne peut plus recourir contre les décisions du TMC ordonnant, prolongeant ou levant la détention provisoire, respectivement la détention pour des motifs de sûreté. La voie de recours en la matière accordée jusqu’à ce jour au ministère public était problématique au regard de l’art. 5 al. 3 CEDH. Pour cette raison et compte tenu de la volonté clairement exprimée par le législateur lors des travaux de révision du CPP, le Tribunal fédéral revient sur sa jurisprudence.

Placer un radar routier sur un terrain privé sans l’accord de son propriétaire est un acte autorisé par la loi (art. 14 CP) et ne rend pas la mesure illicite

Lorsqu’un excès de vitesse est constaté au moyen d’un radar, le conducteur peut demander la production des documents techniques le concernant, ainsi que le procès-verbal de prise de mesure, pour s’assurer de la conformité de cette dernière. Refuser une telle réquisition emporte violation du droit d’être entendu du conducteur. Par ailleurs, les policiers qui placent un radar sur le terrain privé d’un tiers, par hypothèse sans son consentement, agissent dans le cadre de leur fonction, de sorte que leur acte doit être couvert par l’art. 14 CP. Par conséquent, les preuves obtenues par ce biais ne sont pas illicites au sens de l’art. 141 al. 2 CPP.

Infraction d’abus d’autorité : le dessein de nuire à autrui peut résider dans l’acte de contrainte per se

Le Tribunal fédéral confirme sa jurisprudence relative à l’art. 312 CP incriminant l’abus d’autorité : l’agent étatique qui recourt, avec conscience et volonté, à un moyen de contrainte de manière excessive, accepte, à tout le moins, de causer un préjudice à autrui et se rend coupable de cette infraction, quand bien même son but serait légitime. Le dessein de porter préjudice à autrui, tel qu’exigé par l’art. 312 CP, peut résider dans l’acte de contrainte en soi. Dans de telles circonstances, l’intention en tant qu’élément constitutif subjectif n’a plus de portée indépendante. Par ailleurs, le principe d’accusation est respecté même si l’acte d’accusation ne mentionne pas que le recourant aurait dû s’attendre à humilier ou blesser la victime.

Qualité de partie plaignante du créancier en cas d’obtention frauduleuse d’un concordat judiciaire (art. 170 CP)

L’infraction d’obtention frauduleuse d’un concordat judiciaire (art. 170 CP) protège avant tout la bonne exécution de la procédure concordataire et seulement indirectement les intérêts des créanciers de la société en faillite. Ces derniers ne revêtent en tout cas pas la qualité de lésé et de partie plaignante s’ils n’ont pas été admis à l’état de collocation et ne participent donc pas à la procédure d’exécution forcée.

Saisie de données signalétiques et établissement d’un profil ADN : rappel à l’ordre du Tribunal fédéral

La saisie de données signalétiques ainsi que le prélèvement d’un échantillon et l’établissement d’un profil ADN, s’ils ne servent pas à élucider une infraction pour laquelle une instruction pénale est en cours, ne sont conformes au principe de la proportionnalité que s’il existe des indices sérieux et concrets de l’implication du prévenu dans d’autres infractions, mêmes futures. De plus, il doit s’agir d’infractions revêtant une certaine gravité. En l’espèce, le Tribunal fédéral a considéré que la seule inscription, dans le casier judiciaire du prévenu, d’une condamnation pour une infraction à la LStup ainsi qu’à la LCR ne suffit pas pour retenir que de tels indices existent.

Le principe de l’interdiction de la reformatio in pejus s’applique à l’indemnité allouée à l’avocat d’office

En l’absence d’appel principal interjeté par le ministère public sur l’indemnité allouée à l’avocat d’office, l’autorité de recours viole le principe de l’interdiction de la reformatio in pejus en octroyant à ce dernier une indemnité inférieure à celle accordée en première instance.

Le retrait d’une plainte pénale ne conduit pas à l’annulation d’une ordonnance pénale entrée en force

Le principe de l’indivisibilité de la plainte pénale (art. 32 CP) ne permet pas d’en déduire que le retrait de la plainte pénale par le lésé dans toutes les procédures (en rapport à une infraction poursuivie sur plainte) conduit à l’annulation d’une ordonnance pénale entrée en force, et ce alors même que les autres prévenus dans l’affaire ont bénéficié d’un classement de la procédure.